Le Parisien : SDVP : les licenciés continuent la lutte * Répression patronale au garage Ford / Bocquet * Premier Mai : Une journée de lutte des travailleurs * La lutte des sans-papiers, plus que jamais à l'ordre du jour * Politique sécuritaire : à Saint-Ouen, elle est bien partie. * Friche - ZAC Victor Hugo : Les travaux avancent, la concertation commence, la résistance s'intensifie... * Manifestation des mal logés : la mairie doit entendre les revendications * Soutien au peuple palestinien * Editorial : Ne comptons pas sur Chirac pour faire barrage à Le Pen *
En février dernier, 38 salariés avaient été mis à pied, et 15 d'entre eux licenciés, suite à une grève à la SDVP (la société qui distribue Le Parisien) portant entre autres sur les questions salariales (dans une entreprise où la paye moyenne est de 2 500 F par mois). La direction voulait empêcher la CGT de se développer et remettre les travailleurs au pas. Malgré les pressions de toutes sortes, les travailleurs ne s'y sont pas trompés : lors des élections professionnelles, la CGT a obtenu 42 % des suffrages chez les ouvriers et les employés, soit 15 élus contre 2 auparavant. C'est un échec pour la direction. L'inspection du travail a refusé le licenciement des 4 délégués CGT, mais 10 autres salariés de la SDVP et un syndiqué du Parisien, doivent attendre la décision des prud'hommes pour pouvoir être réintégrés. Le comité de soutien qui s'est créé a déjà l'appui de syndicats de la CGT et d'une section du SNES, ainsi que du PCF, des Verts, de LO et de la LCR. Une pétition a recueilli plus de 2 000 signatures.
Pour toucher les autres salariés du groupe, les grévistes injustement sanctionnés ont ouvert depuis le jeudi 25 avril le "Loft des licenciés " : ils seront présent en permanence sous une tente en face de l'imprimerie du Parisien (avenue Michelet). Ils ont besoin de notre solidarité, alors n'hésitons pas à y faire un tour.
Laurent
Répression patronale au garage Ford / Bocquet
Au garage Bocquet, une déléguée syndicale avait déjà été mise à pied et licenciée, ce à quoi ses collègues avaient répliqué par un débrayage d'une heure. L'inspection du travail avait alors annulé le licenciement. Mais une deuxième sanction identique frappe désormais un autre délégué, accusé d'un manque de productivité, alors qu'il travaille dans ce garage depuis des années. L'inspection ne s'étant pas encore prononcée, un rassemblement de soutien a eu lieu devant le garage jeudi 25 avril, avec l'appui de la CGT, des licenciés de la SDVP et de salariés de la RATP (un délégué du syndicat SUD y a été sanctionné par un an de mise à pied) !
" Non, le Premier Mai n'est pas un jour de fête pour les travailleurs conscients. C'est dans le sang ouvrier que les gouvernants ont marqué ce jour en rouge sur le calendrier de l'Histoire. Le Premier Mai ne sera jour de fête et de réjouissances prolétariennes qu'au lendemain de la grève générale victorieuse et de la révolution sociale triomphante. " (Appel de la CGT pour la journée du Premier Mai 1909).
C'est le mouvement ouvrier américain qui lança en 1884 l'idée du Premier Mai comme journée d'offensive afin d'obtenir la journée de travail de huit heures. A Chicago, la grève sera suivie le 3 mai 1886 d'une manifestation des grévistes qui sera violemment réprimée par la police. Le lendemain, au cours d'une grande manifestation de protestation, une bombe est lancée contre les forces de police, lesquelles tirent sur la foule. Des militants anarchistes seront arrêtés, condamnés sans preuve et pendus.
Trois ans plus tard, en juillet 1889, le congrès de la IIème Internationale socialiste réunie à Paris choisit d'organiser une manifestation internationale pour l'obtention des huit heures, tous les Premiers Mai à partir de 1890. En 1891, le 1er Mai, à Fourmies, petite ville ouvrière du nord de la France, la troupe tire sur la population faisant dix morts dont deux enfants. A partir de 1911, avec les tensions au niveau international, les journées du Premier Mai se feront sur des mots d'ordres antimilitaristes, tournés contre les menaces de guerre. Avec l'écho de la révolution russe et le ras-le-bol dans les tranchées, le 1er Mai 1917 vit les positions pacifistes se réaffirmer, une manifestation spontanée se forma à Paris aux cris de " A bas la guerre " et au chant de l'Internationale.
Le 25 avril 1919, la loi pour les huit heures fut adoptée en France pour tenter de calmer les aspirations révolutionnaires, mais la classe ouvrière manifesta en nombre et la répression fut violente. A cette époque, les premiers mai étaient des journées de grève et les manifestations pouvaient être interdites. Un camarade se rappelle comment, dans les années 30, son grand-père raconte s'être fait licencié de chez Citroën pour avoir fait grève ce jour-là. Le 1er Mai 1936 annonce les grandes grèves de juin. Le 1er Mai 1937 aura lieu sans doute la plus grande manifestation jamais organisée en France.
Après ces Premiers Mai de lutte, Pétain, en 1941, a fait de cette journée un jour férié, la fête du travail, reprenant la politique de Hitler qui, en 1933, pour neutraliser l'action des organisations ouvrières, fit du 1er Mai une Journée nationale du Travail pour, le lendemain occuper les locaux des syndicats et arrêter leurs dirigeants. Aujourd'hui, Le Pen suit la même logique et essaie de confisquer cette journée de luttes des travailleurs et de solidarité internationale, en associant la Fête du travail et celle de Jeanne d'Arc. Ne le laissons pas faire.
Laurent
Des dizaines de milliers de travailleurs rasent les murs tous les jours pour aller bosser "au noir". Selon un rapport de la Chambre de commerce, trois secteurs sont particulièrement concernés : l'informatique, le bâtiment et la restauration. Entrés en France sans papiers, demandeurs d'asile territorial ou d'asile politique, ils attendent - souvent depuis longtemps - une régularisation de leur situation, la carte de séjour qui leur permettra de trouver un emploi, d'avoir accès à un logement. " On vit ici, comme tout le monde, on travaille ici, "au noir" évidemment puisque nos patrons ne peuvent pas nous déclarer, nous sommes à la merci du moindre accident de travail, on élève nos enfants sans allocations, on habite des appartements qui ne sont pas souvent loués à notre nom. Nous vivons comme tous les travailleurs mais sans avoir d'"existence réelle". "
La plupart d'entre eux dénoncent la loi qui leur permet d'être régularisés au bout de dix ans de séjour : " Si l'on tient dix ans sans se faire attraper par la police, sans tomber d'un échafaudage, sans retourner au pays, même si l'on se languit de la famille, on peut avoir la carte. Cette loi des dix ans entérine notre situation illégale sur le territoire. Il faut apporter des preuves d'un séjour continu en France, mais comment faire sans bulletin de salaire, sans quittance de loyer et les témoignages de voisins, de commerçants ne sont pas admis. L'un d'entre nous s'est vu refuser la régularisation parce qu'il a passé un mois au pays et eu une petite fille née là-bas neuf mois après. Alors qu'il vit depuis douze ans en France. "
Le traitement apporté pendant l'administration de la "gauche plurielle" a consisté à ignorer puis à rejeter 80 000 sans-papiers de France. Ce gouvernement soit disant de gauche, soit disant généreux, n'a même pas respecté son programme de gouvernement annoncé en 1996, mais a également trahi et bafoué ses engagements relatifs à l'abrogation de toutes les lois xénophobes et racistes, à savoir les lois "Pasqua-Méhaignerie-Debré" en promettant alors, la régularisation de tous les Sans-papiers avec l'attribution d'une carte de séjour de dix ans. Quant à la répression, cette dernière ne fait que s'accentuer : l'ensemble des mouvements et collectifs de Sans-papiers sont étouffés ou réprimés. Les soutiens personnels, associations, syndicats qui soutiennent le combat sont accusés de "délit de solidarité" et sont traînés en justice, puis souvent condamnés à de fortes amendes et de lourdes peines de prison. A Saint-Denis, le 17 avril dernier, vers 17h des policiers prennent en chasse deux sans-papiers après un contrôle. Les deux hommes se réfugient dans les locaux de la coordination 93. Les policiers les poursuivent et réussissent à en interpeller un en cassant une porte vitrée derrière laquelle il s'était réfugié. Cette brutalité policière est une conséquence de la politique sécuritaire qui entretient la confusion entre immigré et délinquant.
Les sans-papiers manifestent régulièrement, demandant une régularisation générale, la libération des détenus pour défaut de papiers, la fermeture des centres de rétention, et l' arrêt définitif des expulsions. Ce n'est ni sur Chirac, ni évidemment sur Le Pen qu'il faut compter pour régler les problèmes, la seule solution c'est la mobilisation, c'est occuper la rue, pour changer cette société qui nous pousse vers la galère et la misère avec ou sans papiers.
Relou
On nous a rabattu les oreilles pendant toute la campagne électorale sur l'insécurité et la nécessité de faire plus pour la sécurité, pourtant ce qui a été fait à Saint-Ouen dans le domaine de la "sécurité" est déjà assez impressionnant :
- D'abord le CLS, contrat local de sécurité, créé par une circulaire gouvernementale en 1997 et mis en place à Saint-Ouen en 1999. Bernard Perego, maire-adjoint, résume bien de quoi il s'agit quand il dit : " Nous avons maintenant l'habitude de travailler ensemble avec les institutions policières et judiciaires ". Tous ensemble derrière les flics et les procureurs : la mairie, les sociétés de HLM Semiso, Aedificat, OPHLM, ODHLM, la RATP, le GISO (affilié au MEDEF), l'Education nationale, les associations du secteur social...
- D'autre part, la municipalité a fait 100 000 francs de frais au 26 avenue Gabriel Péri, paie le loyer de ce local (9 500 francs par mois) et l'a mis à la disposition de la police nationale.
- Elle a également acheté un terrain rue Dieumegard et l'a mis à disposition pour un futur commissariat supplémentaire.
- Elle octroie 4 millions de francs par an à des sociétés de gardiennage pour des missions de surveillance et autres missions de police.
- Elle a mandaté une société pour une étude de sécurisation des parkings publics par vidéosurveillance.
- Enfin, il commence à être sérieusement question de créer une police municipale. Le PC n'est pas contre. On a " évolué ces derniers temps sur cette question " reconnaît Roger Guérin. Les Verts ne trouvent pas normal que nos impôts locaux servent à financer une deuxième fois un service de police. La droite, elle, réclamait six commissariats. On parle d'un référendum. Comme à Vitry.
Tout ca, c'était bien avant la campagne électorale et l'on ne peut pas dire que, depuis, la question ait évolué. Or qui peut croire sérieusement que c'est avec la multiplication des commissariats, des policiers, des caméras... que l'insécurité baissera ? Seule une société plus libre, plus égalitaire, plus juste est, pour nous, à même de ressouder les liens entre les habitants de nos quartiers. Ceci ne sera possible que si l'on s'unit pour lutter dans ce sens.
Loïc
L'aménagement de la ZAC Victor Hugo, à côté de Clichy et du RER C, mobilise toujours les habitants déterminés à ne pas laisser le quartier aux bétonneurs. Le 15 mars s'est tenu à la mairie une réunion censée préparer l'organisation de groupes de travail avec la population, or cette réunion, qui aurait dû se tenir fin janvier, n'était ouverte qu'aux personnes sélectionnées par la mairie. C'est ainsi qu'une vingtaine d'habitants qui souhaitaient participer aux travaux n'ont pas eu l'autorisation d'entrer. Un premier groupe de travail, ouvert à l'ensemble de la population devait se tenir le 25 avril 2002. Le collectif "Friche en ville" a fait des propositions précises pour le maintien des espaces verts et contre le tout-automobile et le tout bureau mais elle s'interroge sur la volonté municipale d'être à l'écoute de la population. En effet, M. Bentolila, l'adjoint à l'urbanisme, a annoncé à plusieurs reprises que " au final, ce sont les élus qui prendront la décision et que, si l'on n'est pas d'accord, il faudra pas voter pour eux lors des prochaines élections ". Ceci semble avoir été fait ; mais, alors que cette concertation commence, les travaux continuent...
Le collectif d'habitants accueille le Festival des résistances et des alternatives qui se clôturera, sur la friche à côté du RER C, le 4 mai à partir de 11 h et le 5 mai à partir de 13 h (pique-nique, musique, projections, débats, expo photos...).
Jean Delarbre
A l'initiative du DAL (Droit Au Logement), une manifestation dynamique de plus de cent personnes a traversé samedi 6 avril les rues de Saint-Ouen. L'objectif était de rappeler que le problème du logement reste entier sur la ville, au moment où prenait fin la trêve d'hiver (qui interdit les expulsions pendant les mois les plus froids de l'année). Les manifestants ont marqué plusieurs arrêts devant les immeubles insalubres où doivent vivre des familles avec leurs enfants, parfois sans eau ni électricité comme à l'hôtel Lucia. Alors que certaines familles doivent squatter, faute d'autres solutions, les slogans réclamaient l'application de la loi de réquisition : cette loi permettrait aux pouvoirs publics de réquisitionner les logements habitables parmi les 2 000 logements vides sur la ville, alors que rien n'est fait pour les familles dans l'urgence. Pour l'instant, le Maire refuse toujours de rencontrer les mal-logés.
Paul
Environ 150 personnes étaient présentes à la réunion publique du comité Saint-Ouen Solidarité Palestine du mardi 2 avril.
Un fait nouveau vient des Etats-Unis : le 20 avril, plus de 100 000 manifestants (75 000 à Washington et 35 000 à San Francisco ) ont défilé contre l'action terroriste de l'armée d'Israël et la complicité de Bush, aux cris de "Nous sommes tous des Palestiniens" et "Liberté pour la Palestine" ! C'est la première fois qu'une manifestation aussi importante a lieu dans ce pays en soutien au peuple palestinien.
Paul
Manifestation de soutien aux palestiniens, dimanche 28 avril 2002 à 15 h, Paris, place de la République. Départ à l'appel de Saint-Ouen Solidarité Palestine à 14 h, métro Mairie de Saint-Ouen.
La politique de la gauche plurielle a été sanctionnée par les électeurs, mais pas de la manière dont on s'y attendait. On n'aura donc le choix qu'entre Chirac et Le Pen, entre un homme de droite ouvertement dans le camp du patronat et un ex-tortionnaire, réactionnaire, raciste et milliardaire. Le Pen a eu 4,5 millions de voix en 1995. En 2002, Le Pen et Mégret en totalisent près de 5,5 millions. L'extrême droite a progressé mais c'est surtout la droite qui a perdu près de 4 millions de voix et l'ensemble de la gauche gouvernementale 3 millions par rapport à 1995. Qui est responsable de la présence de Le Pen au deuxième tour ? Essentiellement la politique menée par le gouvernement de gauche contre les salaires, l'emploi, les sans-papiers et les 35 heures qui ont accru la flexibilité du travail, la précarité et le chômage et qui a écoeuré nombre d'électeurs.
Le maintien de Le Pen au deuxième tour a suscité une émotion légitime. C'est sur cette émotion que s'appuie Chirac pour en appeler à une sorte de front républicain pour faire barrage à l'extrême droite. Le PS, le PC et les Verts ont appelé à voter Chirac, à voter pour le pire pour soi-disant stopper la montée du pire des pires. Une belle duperie qui plébiscitera Chirac et ne mettra pas du tout les prochains gouvernements à l'abri des pressions sécuritaires de Le Pen, qui représente à coup sûr une menace pour les immigrés, les chômeurs, les pauvres et tous les travailleurs.
Le bulletin de vote est loin d'être efficace pour s'opposer à l'extrême droite, et les jeunes qui manifestent -même avec des illusions sur Chirac- ont bien raison de porter le débat dans la rue. Le 1er mai doit être l'occasion pour les travailleurs de montrer leur force pour s'opposer aux lepénistes mais aussi pour affirmer qu'ils entendent contester un futur gouvernement de gauche qui appliquerait hypocritement la politique anti-sociale du MEDEF ou un gouvernement de droite qui ferait cette politique ouvertement. L'extrême gauche, en gagnant 1,3 million de voix, en totalisant près de 3 millions de suffrages, soit 10 % des votants, entend bien exprimer le refus des travailleurs et des jeunes de ce système pourri, qui engendre le chômage, l'exclusion et la misère.
Une riposte s'impose. Il nous faudra engager les luttes inévitables par des grèves et dans la rue, contre le futur gouvernement qui tentera de s'en prendre à nos retraites, à notre travail, à notre niveau de vie, et elles devront être menées de concert par tous les hommes et les femmes de gauche, par les communistes consternés par l'effondrement de leur parti, avec les militants syndicalistes et associatifs et bien sûr avec ceux qui, nombreux, se sont abstenus pour sanctionner la politique de Jospin. Même avec un gouvernement de gauche, il faudra se battre de la même façon. L'avenir réside dans les luttes pour le troisième tour social. Les travailleurs n'en feront pas l'économie.