VALEO, ALSTOM, PARTOUT
Les travailleurs contre les profiteurs de l'amiante
Anciennement nommée Ferrodo, Valeo utilisait l'amiante comme matière première des plaquettes de freins, et Alstom essentiellement comme outillage de protection pour les soudures et les brasures. A ce titre, ces deux usines ont introduit dans Saint-Ouen des tonnes et des tonnes de ce matériau cancérigène.
Les travailleurs d'Alstom viennent d'avoir le résultat d'un procès en correctionnelle, à Bobigny, qu'ils ont intenté à leur ancien directeur pour " mise en danger d'autrui ". Le 18 mai, M. Pierre Krieger a été déclaré coupable et condamné à 50 000 francs d'amende avec sursis, plus 25 000 francs pour les syndicats CFDT et CGT. A notre connaissance c'est la première fois, en France, qu'un chef d'établissement est personnellement condamné dans une affaire d'amiante.
La lutte contre ce fléau mortel a démarré fin 1996, quand ils ont appris le décès d'un de leurs anciens camarades de travail, monteur-transformateur, décèdé suite à un cancer dû à l'amiante. Des centaines d'ouvriers à Alstom Saint-Ouen ont travaillé avec de l'amiante, et ils découvrent brusquement que l'amiante n'est pas seulement un produit nocif parmi d'autres, mais qu'il tue à retardement, entre 10 et 50 ans après inhalation de ses poussières ; et que les patrons, ingénieurs de sécurité, médecins du travail, ministres, experts, etc. savaient tout cela depuis des dizaines d'années.
Ils le savaient !
C'est en 1906 qu'un médecin du travail de Condé-sur-Noireau (Calvados) établit le rapport entre le travail de l'amiante et le décès d'une cinquantaine d'ouvriers. Dès les années 1930, on a mis en évidence qu'il s'agit de cancers. Dans les années 1960, les frères Blandin font breveter un produit de remplacement, qui est racheté par les trusts concernés (Saint-Gobain et Eternit) et l'invention est enterrée. En 1974, l'usine Amisol à Clermont-Ferrand est fermée, les ouvriers occupent l'usine et la font visiter. Des scientifiques de l'université de Jussieu, floquée à l'amiante, font le voyage à l'usine de Clermont-Ferrand Le scandale éclate.. La lutte aboutit à une loi de protection des travailleurs en 1977.
Puis, c'est la Gauche.
1981... L'ambiance est à la concertation, à la réforme par législations, à la collaboration entre syndicats et ministères. Un CPA (comité permanent amiante), proposé et financé par le patronat, est mis en place, qui réunit une quarantaine de spécialistes du patronat, des pouvoirs publics et des directions syndicales. Ce comité étudiera le problème pendant 15 ans, 15 années pendant lesquelles la France restera le premier importateur d'amiante dans le monde (350 000 tonnes par an), 15 années pendant lesquelles les travailleurs, les étudiants, etc. continueront à respirer des fibres mortelles, et les entreprises, à profiter.
Les années 1990.
Mais les maladies et les décès n'attendent pas : 2000 morts en 1996 selon l'INSERM (Institut national de recherche médicale). Une ANDEVA (association de défense des victimes de l'amiante) est fondée début 1996. Elle fait rapidement éclater à nouveau le " scandale de l'air contaminé ". Une loi interdit la vente et l'usage de l'amiante à partir du 1er janvier 1997. Mais la lutte continue. Les épidémiologistes prédisent un accroissement du nombre de décès, jusqu'à 10 000 par an (plus que les accidents de la route), pour un total cumulé à la finale, vers 2040, d'environ 100 000 morts en France. La pression ne se relâche pas. D'abord pour faire payer les responsables, tous les responsables : ceux du patronat commme ceux des pouvoirs publics. Mais aussi pour la prise en charge des victimes et de leur famille. Sur un minimum de 2 000 décès par an actuellement, seuls 86 ont été pris en charge au titre de la maladie professionnelle. Il faut savoir que, contrairement à l'assurance-maladie, la caisse des ATMP (accidents du travail et maladies professionnelles) est financée à 100 % par les cotisations patronales. D'où un barrage systématique des prises en charge.
Voilà dans quelle lutte sont engagés les travailleurs de Valéo et Alstom. Leur combat est celui de tous les travailleurs, car les flocages d'amiante, les freins en amiante, etc. étaient et sont encore présents dans les immeubles, les écoles, le métro...
Loïc
SAINT-OUEN - LYCEE BLANQUI
Un professeur poursuivi en justice par sa direction
Récemment, le lycée Blanqui de Saint-Ouen, comme d'autres en France, a fait participer ses élèves à un concours "Les Masters de l'économie". Ce jeu consiste à donner un portefeuille d'actions boursières évidemment fictives à des classes d'élèves qui sont chargées de les faire fructifier, sous le tutorat de leur professeur d'économie, appelé "parrain" (sic). Ce jeu est patronné par une banque privée, la CIC, qui fournit les actions virtuelles aux élèves et délivre aux gagnants un voyage à la Bourse de New-York. En plus de l'idéologie capitaliste qu'il cherche à inculquer aux élèves, ce jeu est contraire aux principes de neutralité de l'école et va à l'encontre d'une directive ministérielle qui demande de ne pas donner suite « aux sollicitations émanant du secteur privé, dont les visées ont généralement un caractère publicitaire ou commercial. » Cette opération a été condamnée par nombre d'associations et de syndicats. Gilbert Molinier est professeur de philosophie au Lycée Blanqui et a écrit un ouvrage intitulé La gestion des stocks lycéens (l'Harmattan, 1999) où il analyse et dénonce la main mise du capitalisme sur l'éducation. Il a lui aussi réagi en écrivant que cette opération, en " assurant ainsi la publicité d'une banque privée, n'a d'autre objectif que de transformer les jeunes dont nous avons en charge l'éducation en clients de ladite banque dans le meilleur des cas, et en boursicoteurs de bas étage dans le pire des cas, à savoir des oies à plumer en cas de krach boursier ". Le ton de ses lettres adressées au proviseur et affichées en salle des professeurs n'a pas plu à la direction de l'établissement et, voici que le proviseur et le proviseur adjoint portent plainte contre le professeur de philosophie pour diffamation.
Laurent
SAINT-OUEN
Les licenciements à l'Alstom.
Qu'en est-il du plan de licenciements, que vous aviez découvert par hasard en janvier sur l'Intranet de l'entreprise ?
- Les documents préparatoires pour la réunion du CCE (comité central d'entreprise) présentent un plan aggravé par rapport au projet de janvier puisqu'il prévoit 194 suppressions d'emplois au lieu de 184. Sur 614 personnes, ça fait exactement 30 %. Le nombre de pré-retraites n'est pas précisé. Par contre, il y a un chantage aux 35 heures. La signature d'un accord de 35 heures " en moyenne sur l'année " pourrait sauver 29 emplois. En clair : signez l'annualisation, la flexibilité et le blocage des salaires, et nous ferons quelques licenciements en moins ! En ce qui concerne les pré-retraites, ce n'est peut-être pas un hasard si le nombre n'est pas précisé ; la Direction a un projet-maison avec une baisse de salaire de 30 % ! Sans oublier que beaucoup de travailleurs immigrés, de femmes et même d'ingénieurs n'ont pas tous leurs trimestres de cotisations. De toutes façons, il resterait plus d'une centaine de licenciements " secs ".
Quelle est la réaction des travailleurs ?
- Le 19 mai, à 150, nous avons empêché la tenue de cette réunion de CCE en bloquant la Maison de la Chimie (rue Saint-Dominique à Paris) où elle devait se tenir. De même, le jeudi 27 avril, la réunion de CCE devant annoncer les licenciements dans la division Transport avait été bloquée par les travailleurs en manifestation devant le siège (rue Albert Dhalenne à Saint-Ouen). Même scénario le 12 mai à Levallois pour le CCE de la division Alstom Power au sujet des 1500 licenciements à La Courneuve, Lys-lez-Lannois et Belfort. Pour le mardi 23 mai, les travailleurs de toutes les filiales Alstom se lancent dans une action nationale. S'unir pour arrêter les licenciements dans toutes les filiales Alstom et dans toutes les boîtes, c'est ce qu'il faut organiser.
Sol et un travailleur de l'Alstom Saint-Ouen
Travailler pour gagner sa vie, pas pour la perdre !
Après une douzaine de jours, la grève des convoyeurs de fonds continue. Malgré, la gêne occasionnée par l'absence de monnaie aux distributeurs, les travailleurs se sentent solidaires des grévistes. Pour 6500 francs par mois, risquer sa peau pour transporter les milliards des banquiers et des grandes surfaces, ce n'est pas une vie. Ils ne sont pas les seuls à avoir un métier à risque. Le bâtiment a fait 174 morts par an en 1997, les transports et la manutention 135, la métallurgie 76, etc. et pour des salaires qui mériteraient d'être augmentés d'au moins 1500 francs comme le demandent les convoyeurs de fonds. Les milliards de profits peuvent servir à améliorer les conditions de travail et la vie des travailleurs. Une poignée de salariés a le pouvoir de bloquer la machine économique des patrons. Or, les travailleurs ne sont pas une poignée, ils font tout marcher et peuvent tout changer.
Léo
Une vie de chien.
L'explorateur polaire Amundsen obtenait les meilleurs rendements avec ses chiens en leur faisant tirer les traîneaux seulement 6 heures par jour et reposer 18 et en leur accordant le repos hebdomadaire. En somme, la semaine de 36 heures ! Amundsen n'aurait jamais eu l'idée d'annualiser le temps de travail des chiens, les faisant travailler, par exemple, trois semaines d'affilée 48 heures en six jours, suivies d'une semaine de repos. Ce qui a été obtenu par les chiens de traîneaux d'Amundsen en 1911 ne l'est toujours pas pour les hommes de l'an 2000.
Léo
HISTOIRE SOCIALE
Découvrez la Commune de Paris.
Le musée d'Art et d'Histoire de Saint-Denis, 22 bis rue Gabriel Péri à Saint-Denis (tél. 01 42 43 05 10), nous offre jusqu'au 19 juin 2000 une exposition de photos, par un photographe de la Commune, Bruno Braquehais (1823-1874), de tableaux, dessins et témoignages historiques. Du lundi au samedi, de 10 heures à 17 heures. Dimanche de 14 heures à 18 h 30. Sauf le mardi. Les photos sont très parlantes, mais manquent parfois d'explications. Rappelons donc l'essentiel.
En 1871, après la défaite de Sedan et l'abdication de Napoléon III, Paris est assiégée par les Prussiens. Le gouvernement de Thiers, réfugié à Versailles, veut désarmer le peuple, récupérer les canons achetés par les travailleurs parisiens. C'est l'insurrection le 18 mars. La Commune est proclamée le 28 et le mouvement s'étend à Lyon, Marseille, Narbonne, Toulouse, Saint-Etienne. Pendant sa courte existence, la Commune prendra des mesures radicales. Disposant du pouvoir exécutif et législatif, les élus et les fonctionnaires de la Commune, juges, policiers, etc... étaient responsables, révocables à tout instant et rémunérés d'un salaire ouvrier. L'armée fut remplacée par une garde nationale, l'armée de la classe ouvrière. L'Eglise fut séparée de l'Etat, on lui supprima tout droit d'ingérence dans les établissements d'enseignement, ouverts à tous gratuitement. La Commune, ce fut le premier pouvoir révolutionnaire prolétarien. Rien à voir avec un gouvernement de " gauche ". La bourgeoisie, ivre de revanche sur les travailleurs barricadés dans Paris, mit fin à la Commune par un véritable carnage au cours de la semaine sanglante du 22 au 28 mai 1871. Mais comme dit la chanson : « Souviens-toi, Nicolas, que la Commune n'est par morte... ».
Koé
EDITORIAL
Le MEDEF en veut toujours plus...
Si les chômeurs et les précaires ont appelé à manifester le samedi 20 mai, c'est qu'ils ont bien des raisons de ne plus supporter la situation qui leur est faite, pas plus que les menaces que les patrons font peser sur les négociations de l'UNEDIC.
La convention UNEDIC vient en effet à expiration le 30 juin. Alors que les ASSEDIC n'indemnisent que 40 % des chômeurs, que les travailleurs précaires ne le sont pas, le MEDEF tente d'imposer encore plus de précarité à l'ensemble des travailleurs.
A la place des CDI, ils voudraient imposer des contrats de travail de 5 ans, ainsi les patrons n'auraient plus à licencier ni à payer d'indemnités.
D'autre part, l'indemnisation du chômage ne serait plus qu'un " contrat d'aide au retour à l'emploi ". Il serait établi un bilan de compétence pour chaque chômeur, suivi d'une proposition d'emploi ou de stage. Les indemnités seront supprimées en cas de refus afin d'obliger les sans-emploi à accepter des sales boulots payés au rabais, sous la menace de la pénalisation financière d'être radiés des ASSEDIC. Le patronat prétend faire la différence entre les " mauvais chômeurs ", les fainéants qui profiteraient du système, et les bons, qui accepteraient n'importe quel emploi à n'importe quel salaire.
L'objectif du patronat, avec la complicité du gouvernement en renforçant la pression sur les chômeurs, est d'accroître la flexibilité des salariés, de disposer d'une main-d'oeuvre de plus en plus précaire, sous-payée, non indemnisée.
Les profits patronaux sont en hausse, le budget de l'Etat en excédent, les caisses de l'UNEDIC sont pleines. Les projets du MEDEF sont scandaleux. Certains syndicats protestent en parole mais n'envisagent pas de riposte efficace à ces menaces. S'ils ne veulent pas en subir les conséquences catastrophiques, les travailleurs en activité et ceux privés d'emploi devront s'y opposer énergiquement.
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